Béatrice MOLLE-HARAN

“Un frémissement positif, tant tout semblait paralysé”

Des initiatives nécessaires relayées de plus en plus par la société civile qui a compris l’intérêt du réglement d’un conflit séculaire

La délégation basque qui maintient des échanges avec le ministère de la Justice à Paris concernant la situation des prisonniers basques a confirmé dans un communiqué un “premier geste”. La levée du régime de “détenus particulièrement signalés” (DPS) pour sept d’entre eux : Didier Agerre, Jon Salaberria, Ibon Fernandez Iradi, Itziar Plaza Fernandez, Jon Bienzobas Arretxe, Zigor Garro Perez, Asier Borrero Toribio. Vingt-neuf prisonniers basques sont encore sous ce régime. Certes, l’avancée est modeste mais représente cependant un frémissement positif, tant depuis des années tout semblait paralysé.

Un prélude à la mobilisation attendue à Paris le 9 décembre prochain sous-tendue par des demandes urgentes : la fin de la dispersion et la libération des prisonniers malades. Deux revendications qui seront également portées en amont par une délégation d’élus et diverses organisations soutenant un tour de France des prisons où sont incarcérés les prisonniers basques.

Des initiatives nécessaires relayées de plus en plus par la société civile qui a compris l’intérêt du réglement d’un conflit séculaire après l’arrêt définitif de la lutte armée unilatéralement décidée par ETA le 20 octobre 2011 et le désarmement le 8 avril dernier.

Des initiatives qui, si elles agglutinent de plus en plus de secteurs politiques et sociaux, doivent sans cesse élargir leur champ d’action. Car au final, la paix qui se travaille est l’affaire de tous et de toutes et ne doit pas se cantonner au seul monde abertzale.

Les inscriptions nombreuses annoncées pour la manifestation du 9 décembre à Paris laissent augurer d’un probable succès. Il faudra transformer l’essai et continuer à convaincre les plus réticents de la nécessité du réglement du conflit. Rechercher les convergences en gardant son identité, travailler sur la mémoire en n’excluant aucune des victimes d’un bord ou d’un autre.

Caroline Emcke, philosophe allemande et reporter de guerre, est l’auteure d’un livre récemment paru : Contre la haine. Plaidoyer pour l’impur. Livre primé et salué par la critique qui dans un contexte totalement différent propose des pistes quant à des sorties de conflit avec notamment ses réflexions sur la haine : “Il est difficile de haïr avec précision. Avec la précision viendrait la tendresse, le regard ou l’écoute attentif, avec la précision viendrait ce sens de la nuance qui reconnaît chaque personne, avec ses inclinations et ses qualités multiples et contradictoires, comme un être humain. Mais une fois les contours estompés, une fois les individus rendus méconnaissables comme tels, il ne reste que des collectifs flous pour destinataires de la haine (...)”.

Des pistes de réflexion pour chacun et chacune aux fins d’élargir le socle de soutiens à des mesures justes porteuses d’avenir. Tous et toutes évidemment concernés.