Mehdi OURAOUI
Mouvement Génération.s
PAROLE AU POLITIQUE

Fêtons la trêve !

Mehdi Ouraoui. © DR
Mehdi Ouraoui. © DR

Au moment où ces lignes sont publiées, les Fêtes de Bayonne viennent de se terminer. La politique française se déchire sur l’affaire Macron-Benalla. Au Pays Basque, la polémique la plus récente était plus modeste : elle portait justement sur les Fêtes payantes. Mais dans les Fêtes, si tout n’est pas oublié, ni pardonné, tout est mis entre parenthèses, le temps d’une trêve.

Il ne s’agit pas d’effacer la dimension (très) politique, des Fêtes. En négatif, lorsqu’est supprimé le bertsu d’ouverture au balcon de la Mairie de Bayonne, triste symbole pour la langue basque. En combatif, quand les féministes du Pays Basque Nord, comme en Pays Basque Sud, tentent d’éradiquer les violences sexistes de nos rues. En positif, quand les barrières de couleur, de classe sociale, d’origine, sont abolies entre les festayres qui ne sont plus que rouges et blancs mêlés.

Il ne s’agit pas, non plus, de supprimer les nuances, les contradictions, le dialogue parfois agité, qui font la valeur de la démocratie. Par exemple : les Fêtes sont magiques, mais pas au point de nous faire penser que la députée de la 5e circonscription est à la hauteur de son mandat ! Et le débat est sain. D’ailleurs, il manque parfois cruellement en dehors des Fêtes : où sont nos débats clairs, politisés au sens noble du terme, sur l’avenir de la CAPB ? Dans les années qui viennent, offrirons-nous aux citoyens un choix clair entre plusieurs visions, de gauche, de droite, du centre, sur des questions cruciales : le logement, la spéculation sur la Côte, l’écologie, l’économie et la société que nous voulons demain au Pays Basque ? Les débats, même âpres, sont légitimes.

Mais les Fêtes nous enseignent une valeur essentielle : la fraternité, qui impose parfois la trêve. La fraternité, trop souvent oubliée dans ces temps troublés. La fraternité, que le Conseil constitutionnel vient de consacrer, saisi par Cédric Herrou, un ami du Pays Basque, qui défend les migrants dans sa vallée de la Roya. La fraternité, qui est bizarrement moquée, raillée, dans un monde où seuls le consumérisme, le marché, le sexisme, la haine de l’autre semblent désormais imposer leur loi. Dans ce monde-là, les Fêtes, celles de Bayonne mais aussi de tant de villes et villages, de Iruñea à Hasparren et ailleurs, les Fêtes imposent leur trêve.

Cette trêve fraternelle, elle est intimement liée à notre identité, à l’identité du Pays Basque. Pas seulement parce que la paix a fait un pas historique et magnifique ces derniers mois grâce aux Artisans de la Paix. Mais aussi parce que la trêve des Fêtes dit ce que nous voulons être, ces quelques jours et tout le reste de l’année : une société ouverte, de la convivialité, qui refuse le repli individuel, et célèbre la joie collective. Elle dit que la politique ce n’est pas la guerre, et qu’on se retrouvera tôt ou tard autour d’un verre ou d’un chant. Elle dit que cette fraternité, “jouer groupé”, est indispensable pour faire entendre un territoire que nous aimons toutes et tous. Vive les Fêtes de Bayonne, vive la trêve, et vive la fraternité !