Laurent PINATEL
Producteur de lait dans la Loire - Porte-parole de la Confédération paysanne
TRIBUNE LIBRE

De quoi Lactalis est-il le nom ?

Depuis quelques semaines, l’entreprise Lactalis est au cœur de la tourmente, au centre de l’actualité.

Nouveau ? Pas réellement. Le géant laitier mondial a toujours fait la pluie et le beau temps dans le secteur laitier.

Deux maîtres mots : Discrétion (ou opacité) et efficacité.

On ne négocie pas avec Emmanuel Besnier, le richissime patron de l’entreprise mayennaise. On se soumet ou on dégage.

Un souci de salmonelle ? Des réprimandes du ministre de l’Economie Bruno Lemaire ? Profil bas et une semaine après voila notre bon Stéphane Travers, ministre de l’Agriculture, qui réunit la famille laitière pour resserrer les rangs autour de la “filière” à la grande satisfaction du boss Besnier… Reçu le matin même par ce même Travers…

Lactalis, c’est un système

Lactalis, c’est le symbole absolu de la main mise de l’agro-industrie sur la production agricole au détriment des paysannes et des paysans ! Les gens de Lactalis osent l’affirmer haut et fort, ils ont besoin de lait, pas de producteurs !

Ce symbole est également celui de la démission de l’Etat devant ces grands groupes.

Non respect de la loi sur la publication des comptes, mais Besnier est quand même reçu par les ministres.

Non rémunération des producteurs mais l’entreprise est encore et toujours défendue par les gouvernants.

Se pose donc de toute évidence le lien entre cette situation délirante et l’industrialisation de l’agriculture poussée à marche forcée de l’alimentation.

Régulièrement, les démissions successives des pouvoirs politiques, l’abandon des politiques de régulation, la moindre implication de l’Etat dans la vie économique et publique ont laissé la main à des lactalis et consorts… Simplement, il est question de biens alimentaires… Doit-on considérer que l’alimentation est un bien marchand comme un autre ?

Doit-on accepter que l’on fasse son beurre sans aucune limite ni aucune morale sur le dos de l’alimentation des gens, de la rémunération des paysannes et paysans, de leur existence même…

Doit-on considérer que l’appât du fric justifie tout, autorise tout ?

Il va en faire quoi de tout son pognon Besnier ?

Le cacher, honteusement au Panama ?

Est-ce ça la finalité de la vie ? Précariser salariés et producteurs pour gagner encore et toujours plus de fric ? Mais ça ne se mange pas le pognon !

Il va donc falloir combattre tous les lactalis et leurs sbires.

Il va donc falloir continuer de dénoncer, de proposer, de construire un autre avenir pour les politiques agricoles alimentaires au service des paysannes et des paysans et aussi des citoyens et citoyennes.

Il nous faut remettre en cause l’accumulation inique de richesses dans les mains de quelques-uns, plaider pour plus de solidarité, pour une réelle reprise en main du manche par le pouvoir politique.

Alors, nous continuerons à utiliser tous les outils qui sont à notre disposition.

Le recours juridique… La Confédération paysanne a déposé il y a plusieurs mois des plaintes contre Lactalis (entre autres) pour “extorsions”… La justice les a laissées pour lettre morte…

L’action syndicale… Nous n’aurons de cesse de nous faire entendre devant les grilles du géant laitier pour revendiquer une rémunération juste des producteurs… Et même si, là aussi, Besnier est très prompt à nous coller devant un tribunal pour nous faire taire.

Non, nous ne nous tairons pas ! Nous n’aurons de cesse de nous attaquer aux injustices flagrantes, à la non répartition de la valeur créée par notre travail. Nous ne cesserons pas !

Lactalis, c’est ça… C’est le symbole de l’outrecuidance, du mépris…..

Lactalis, c’est un Etat qui nous fait honte en privilégiant la défense de ces millionnaires plutôt que de permettre, d’imposer par la loi un revenu pour tous les paysans et toutes les paysannes !