Léopold DARRITCHON
Ancien maire et conseiler général du canton de La Bastide de Clairence
TRIBUNE LIBRE

Une nouvelle réflexion prospective pour l’horizon 2050

Au moment où la nouvelle agglomération Pays-Basque lance une réflexion sur l’horizon 2050, je voudrais en tant qu’ancien élu local, mais aussi tout simplement en tant qu’individu de la société civile, faire quelques observations et suggestions.

1. Réflexion sur la méthode

C’est la troisième fois en 30 ans que cet exercice de prospective est lancé après PB 2010, puis PB 2020.

La méthode a été la même : on prend la tâche d’un cabinet d’études extérieur (louable pour prendre du recul) qui dresse un état des lieux, qui fait un découpage territorial qui se veut pertinent et qui termine par des préconisations sur les politiques de développement économique par filières.

La suite on la connait… C’est une continuité qui se traduit par un gonflement de la zone côtière, un développement plus modeste (résidentiel essentiellement) de la zone intermédiaire, et la poursuite de l’hémorragie de la partie intérieure.

L’attractivité de la zone côtière est trop forte, et l’effet ventouse se poursuit inexorablement !

Va-t-on recommencer cette fois encore avec les mêmes méthodes, nous proposant vraisemblablement un nouveau découpage du territoire, plus pertinent encore, et des préconisations, teintées du nouveau concept à la mode de développement durable, mais qui ne changeront rien à la lame de fond sus-évoquée ?

2. Réflexion sur l’horizon

2050, ce n’est plus du court terme, c’est du moyen terme.

Les analystes macroéconomiques et autres mettent souvent en avant les années 2050 et 2100 pour décrire le début d’un véritable tournant dans l’évolution de notre mode de vie, voire de notre société.

D’ici là, que nous prédisent ces analyses :

– une crise financière de très forte amplitude ;

– une limitation de l’énergie fossile disponible et son renchérissement inéluctable ;

– des changements climatiques qui n’épargneront aucune région du monde, notamment les zones littorales ;

– les dangers de l’urbanisation à tout crin ;

– les bouleversements créés par le niveau sans précédent atteint par la population mondiale

Ces données, faut-il les ignorer en pensant que dans notre beau Pays-Basque nous serons épargnés, et qu’il suffit de faire une simple extrapolation de la situation actuelle pour penser le futur ? Je ne le crois pas. Je fais partie de ceux qui donnent un certain crédit à ce qu’on nous prédit et qui est déjà malheureusement parfois perceptible.

3. Une proposition osée.

Dans les années 60, le Brésil avait choisi de faire une véritable révolution pour l’occupation de son espace territorial totalement déséquilibré, avec la création ex nihilo de Brasilia en pleine brousse. Même si la comparaison peut paraitre disproportionnée, c’est l’esprit qu’il faut en retenir.

En effet, pour à la fois :

– arrêter l’urbanisation à outrance sur la zone côtière menacée à terme par la montée des eaux ;

– éliminer de façon drastique les transports utilisant des matières premières fossiles ;

– développer une nouvelle manière d’utiliser l’espace agricole ;

– permettre à la population de l’intérieur de ne plus regarder la Côte comme un mirage, un eldorado.

Il faut :

– créer un Brasilia local situé en plein centre de notre territoire ;

– et l’accompagner par la création d’un réseau ferré reliant dans un premier temps ce nouveau centre de développement avec la Côte, et dans un deuxième temps avec les autres parties du territoire ; ces voies ferrées devant être les modes de déplacement principaux des personnes et des marchandises.

Ce pari là suppose un vrai transfert d’activités afin qu’à terme, le Pôle Côtier et le Pôle Central s’équilibrent. La spécificité du Pôle côtier conserverait naturellement sa dominante de secteur tertiaire avec ses principaux atouts (les plages, le port, l’aéroport et une partie des services administratifs, publics et privés). La spécificité du Pôle central devant monter en puissance sur les secteurs primaire et secondaire avec une agriculture repensée, une industrie de niche, spécialisée, le tout renforcé par l’autre partie des grands services administratifs, publics et privés.

Cela pourra paraître utopique pour certains, et dangereux même pour ceux qui ne veulent au fond que rien ne change.

Je reste persuadé que ce n’est qu’à ce prix là qu’on changera radicalement l’évolution de notre territoire, qu’on se préparera aux grands enjeux de demain et qu’on préparera sérieusement l’avenir de nos enfants.