Béatrice MOLLE-HARAN

La nécessité d’aborder toutes les conséquences du conflit basque

La question principale qui va se poser très vite étant de savoir comment sort-on de décennies de violence des deux côtés ?

Béatrice MOLLE-HARAN © DR
Béatrice MOLLE-HARAN © DR

Les deux jours de conférence organisés par le Forum social au Ficoba d’Irun sur la situation des Basques en exil (p. 6) est l’occasion de rappeler qu’hormis les politiques d’exception vécues par les prisonniers basques, s’ajoute la problématique des exilés, réfugiés et déportés basques dans des pays lointains. Des drames humains rangés à la catégorie “conséquences” du conflit basque. Des situations juridiques inextricables, impossibles à vérifier au sein de l’Etat espagnol et entraînant des situations ubuesques dans la vie quotidienne de militants âgés.

Cela pour la forme. Sur le fond, cette réalité rend d’autant plus prégnante la nécessité de se mobiliser pour la paix et de saisir sans relâche l’opportunité présente depuis l’arrêt définitf de la lutte armée par ETA et son désarmement complet il y a bientôt une année.

Verre à moitié plein ou à moitié vide, chacun et chacune analyse en fonction de son vécu et de son histoire personnelle. Rien de tel dans ces cas-là de se raccrocher aux faits. “Facts only Facts”, comme disent les anglo-saxons. Et constater que pour la première fois, un espace de dialogue est ouvert entre le ministère de la Justice française et une délégation basque composée d’élus, de représentants d’associations et de membres de la société civile. Pour l’instant, nous attendons la concrétisation par des actes, de paroles prononcées à propos du rapprochement des prisonniers par la ministre de la Justice Nicole Belloubet.

Personne n’est dupe dans cette affaire, et l’on se doute que les conséquences d’un conflit de plus de cinquante années ne vont pas s’effacer et se régler en quelques semaines. C’est aussi une période propice aux manipulations et déclarations en tout genre, la paix ne fait pas l’affaire de tout le monde et le chemin s’avère tortueux.

Le plus important étant la volonté de la dénommée “société civile” expression dévoyée parfois, mais qui, ici, prend tout son vrai sens. On le voit avec, entre autres, la prise de position sans ambiguïté d’une partie de la communauté catholique de ce territoire qui a su dépasser ses propres blocages et appréhensions, inhérents au climat engendré par un conflit armé durant des décennies. Et s’engager. Regrettant aussi au passage que le berger du troupeau, en l’occurrence l’Evêque, reste en marge.

La question principale qui va se poser très vite étant de savoir comment sort-on de décennies de violences des deux côtés ? Et l’on sait désormais, des expériences ont eu lieu sous d’autres latitudes, que la réconciliation est une donnée fondamentale, voire capitale et inévitable. Non pas une réconciliation de façade, mais bien une réconciliation organisée, où les institutions en plus de la société civile ont leur rôle à jouer, et où la vérité des faits ne doit pas être cachée.

Et que l’on ne fasse pas le faux procès aux “artisans de la paix” de ne se préoccuper que de certaines victimes. Qui peut être assez sot pour penser qu’une telle démarche n’inclut pas tous les acteurs de cette tragédie humaine et politique ? Les donneurs de leçon risquent de pointer leur nez : écoutons avec bienveillance... Et traçons la route vers une paix juste.