Antton Rouget
Journaliste
LES PREMIERS PAS DE MACRON

La «révolution» libérale doit s’accélérer en 2018

Sept mois après son élection, Emmanuel Macron a profondément renouvelé certains codes de la Ve République. Mais derrière la communication et le vernis de la modernité, le nouveau président de la République compte accélérer sa «révolution» libérale, en recyclant les vieilles rengaines de la droite.

Les électeurs de gauche qui ont propulsé Emmanuel Macron à l’Elysée n’ont pas fini d’étaler leurs remords. En mai dernier, pour barrer la route à Marine Le Pen et François Fillon, des milliers de soutiens potentiels aux candidats progressistes ont préféré voter dès le premier tour pour l’ancien secrétaire général adjoint de François Hollande. Emmanuel Macron est «jeune», «ambitieux», «révolutionnaire» mais surtout «en même temps de gauche et de droite», plaidaient ces électeurs, en imaginant le nouveau président comme un produit de synthèse abouti de la social-démocratie.

Sept mois plus tard, les événements montrer que parler de «gauche» ou de «social» était un abus de language. Après un début de quinquennat marqué par le dépeçage du code du travail, Emmanuel Macron –auréolé par des meilleurs sondages que ses prédecesseurs et les soutiens venus de la droite – promet d’accélérer en 2018, avec pour premier chantier, la réforme de l’assurance chômage.

À coup sûr, la présidence Macron a impulsé sur le fond une modernisation des codes et des pratiques dont la Ve République avait clairement besoin. En surfant habilement sur le rapport entre les citoyens et cette sorte de «monarchie présidentielle» l’ancien ministre de 40 ans s’est vite installé dans ses nouveaux costumes, ceux d’un empereur de la communication, obsédé par la scénarisation de son action. Macron répond à Trump sur Twitter, met en scène la moindre de ses décisions et profite des réseaux sociaux pour contourner les médias traditionnels.

Le contraste est saisissant avec ses prédecesseurs, lesquels s’étaient rapidement laissés aspirer par la lourdeur de l’appareil d’Etat. De son passage à l’Elysée en tant que secrétaire général adjoint de François Hollande, Emmanuel Macron garde sans doute en mémoire les erreurs de communication fatales de l’ancien président socialiste dès le début de son quinquennat.

Cette rénovation des pratiques a façonné l’image d’un président moderne, quand bien même le fond de sa politique repose sur la vieille rengaine libérale.

Ainsi, alors qu’il n’a pas pris la moindre mesure marquante contre le réchauffement climatique, sa prise de bec publique avec Donald Trump autour du slogan “«Make our planet great again”» a installé l’idée d’un président écologiste. De même, après avoir accompli les rêves du patronat en assouplissant les règles du code du travail en septembre, l’exécutif d’Emmanuel Macron s’apprête dès le début de l’année 2018 à réformer l’assurance chômage pour accroître les dispositifs de contrôle sur les demandeurs d’emploi en revendiquant la nécessaire «transformation du pays».

Toujours au nom d’une prétendue «modernité», Emmanuel Macron essaye de renvoyer les opposants à ses réformes brutales – jamais conduites sous une présidence de droite–- à des conservateurs tournés vers le passé.

Le décalage entre la posture présidentielle et le fond de ses propositions se creuse également dans le dossier des migrants, alors qu’une circulaire validée par le ministère de l'Intérieur (permettant de contrôler les populations accueillies dans les centres d'hébergement), a provoqué une levée de boucliers. «Aucun gouvernement depuis la Seconde Guerre mondiale n'avait osé aller jusque-là" a dénoncé l’historien, Patrick Weil estimant que "Monsieur Macron, c'est l'inverse de monsieur Sarkozy» : «il est doucereux verbalement, et sur le terrain c'est la dague. Il est un peu comme un chasseur à cour qui ferait des messages d'amour, le soir, pour les animaux».